Faire «pression» sur le gouvernement ou rompre avec un pouvoir prêt à tout pour imposer sa réforme des retraites? C’est une question qui est ouvertement posée alors que, face à une mobilisation toujours forte et une colère grandissante, Macron reste inflexible, combinant répression du mouvement social et multiples propositions de «dialogue» faites aux organisations syndicales.
Cette question prend d’autant plus d’acuité que s’est ouverte, le 30 janvier, la «conférence de financement» du prétendu déficit de l’actuel système des retraites: une conférence dont la tenue est en soi, par ses objectifs, contradictoire aux objectifs d’une mobilisation tenace, à la fois mouvante et diverse dans ses formes, exprimant une immense hostilité à l’égard de Macron et de son gouvernement.
RATP et SNCF: les travailleurs « suspendent » la grève (mi-janvier)
Le constat est unanime: la grève illimitée, engagée le 5 décembre à la RATP et à la SNCF, fut exceptionnelle par sa durée et joua le rôle de fer de lance de la mobilisation générale contre le projet gouvernemental de réforme des retraites. Mais l’épuisement finit par l’emporter, et c’est en vain que les grévistes du rail et du métro ont attendu l’entrée en grève continue d’autres secteurs professionnels.
Finalement, le 18 janvier, au 45e jour de grève, l’UNSA-RATP annonce suspendre la grève. La veille, seules les assemblées générales de trois des lignes du réseau avaient décidé de poursuivre la grève illimitée.
Cette déclaration marque un tournant: ce syndicat, le plus important à la RATP, a joué un rôle moteur pour impulser la grève illimitée, un rôle d’autant plus remarquable que ce syndicat appartient à une confédération qui, elle, soutient l’essentiel du projet gouvernemental.
En quelques jours, la grève illimitée prend fin à la RATP et à la SNCF en dépit de quelques dernières poches de résistance.
Le gouvernement put alors espérer que, rapidement, ce serait l’ensemble de la mobilisation qui refluerait: il n’en fut rien. La volonté générale de mettre en échec la politique de Macron demeurait inentamée. Elle s’exprima ainsi le 24 janvier, jour où le projet de réforme était présenté en Conseil des ministres. Sous la forme de deux projets de loi, l’un organique, l’autre ordinaire.
Vendredi 24 janvier: nouveau « temps fort »
Ce nouveau «temps fort» de grèves et manifestations fut plus important que le précédent, celui du 16 janvier, sans atteindre pour autant les niveaux de décembre: selon la CGT, le cortège parisien rassembla plus de 350’000 manifestants, et l’ensemble des manifestations à travers le pays regroupèrent 1,3 million de personnes (800’000 annoncées pour le 16 janvier). Même la police dut enregistrer une augmentation incontestable du nombre de participants. Ce fut ainsi le cas à Lyon (près de 20’000 manifestants selon les syndicats).On retrouve ce jour-là des aspects déjà observés: une présence très forte de la CGT, à côté de laquelle FO fait pâle figure, la présence de nombreux enseignants le plus souvent regroupés avec la FSU, et aussi une participation médiocre du secteur privé (avec davantage de débrayages que de grèves). De nouveau, également, de très nombreuses manifestations, (350 comptabilisées), jusque dans nombre de petites villes (à Bergerac – département de la Dordogne – par exemple, avec 650 manifestants).
Mais ces manifestations montrèrent au moins deux aspects nouveaux: la forte présence de la Recherche et du Supérieur, et la présence – nouvelle par son importance – des avocats, notamment les moins aisés (ils sont 70’000 dans le pays et leurs ressources sont très disparates).
D’autres secteurs étaient présents de manière significative: égoutiers, personnels hospitaliers, travailleurs de la culture, cheminots (de nouveau en grève pour la journée) et agents du métro. Plus importants aussi sont les cortèges de manifestantes, qui affirment que la réforme aggravera la situation des femmes, contrairement à ce que raconte le gouvernement.
Forte mobilisation dans l’enseignement public
Les enseignants sont particulièrement touchés par la réforme des retraites, et ce ne sont pas les prétendues compensations promises par le gouvernement qui vont modifier la brutalité de cette réforme. La baisse du niveau des pensions de retraite serait pour eux de 30%.
En outre, les enseignants de lycées se trouvent confrontés à une réforme profonde du lycée, qu’ils rejettent, et qui est complétée par une réforme du baccalauréat: en réalité une véritable destruction de ce diplôme national, qui se traduit par l’introduction d’épreuves organisées en cours d’année, lycée par lycée, les E3C (Epreuves communes de contrôle continu).
Ces épreuves sont organisées à partir du 20 janvier, pour la première fois, et provoquent la colère des enseignant·e·s qui refusent notamment le bachotage permanent, l’inégalité devant les épreuves, et la mise en cause du caractère national du diplôme.
Dans cette situation, où se conjuguent ainsi pour ces enseignant·e·s plusieurs réformes, se développe dans leurs rangs une immense rage contre la politique gouvernementale, une rage qui se concentre contre ces E3C: nombreux sont ceux qui tentent alors de bloquer ce nouveau dispositif.
En dépit des déclarations du ministre Jean-Michel Blanquer qui prétend que tout se passe bien, la réalité est tout autre. Lycée par lycée, en assemblées générales, puis par des coordinations diverses, les enseignant·e·s passent outre : refus de surveillances des épreuves, refus de choisir des sujets, rétention des copies… Des élèves bloquent des lycées, des initiatives se multiplient. De nombreux lycées sont touchés à des titres divers, un syndicat des chefs d’établissement crie son désarroi face aux difficultés.
La réponse ministérielle est d’une grande brutalité: plaintes contre des enseignants (par exemple : plainte contre 13 enseignants de Montbrison, département de la Loire), responsable syndical convoqué au commissariat, intervention brutale de la police contre les lycéens (intervention de la police à l’intérieur du lycée Vaucanson à Grenoble…), lycéens mis en garde à vue, etc.
Tout cela ne fait qu’exacerber la colère des enseignants, et nourrit les rangs des grévistes et des manifestants.
Mobilisation dans la Recherche
Un autre front se dessine, face au projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche. Les chercheurs rejettent en particulier de nouvelles formes de précarité envisagées par la ministre [Frédérique Vidal], des contrats alternatifs au statut de fonctionnaire (tels les contrats de «tenure track»).
C’est ainsi que commencent à s’agglutiner, autour du combat contre le projet de réforme des retraites, d’autres combats. Leur point commun? Le rejet profond du gouvernement et de toute sa politique, un combat très large dont le salariat est le moteur, entraînant derrière lui d’autres catégories, tels que les avocats.
Mais de tels combats ne peuvent se substituer au combat central contre le projet macronien de réforme des retraites.
Des grèves-pression très mesurées
A partir du 5 décembre, et durant les longues semaines de grève à la RATP et à la SNCF, beaucoup ont espéré l’engagement dans la grève d’autres secteurs jugés décisifs, en particulier les dockers des ports et les travailleurs des raffineries: des secteurs capables de bloquer toute l’économie, fortement syndiqués et ayant, dans le passé, fait preuve de leurs capacités de combat. Cette attente était particulièrement forte parmi les travailleurs du rail et du métro parisien. Un autre secteur pouvait constituer une menace pour le gouvernement: celui de l’électricité.
Durant des semaines, l’appareil de la CGT (syndicat très implanté dans ces secteurs) a fait miroiter l’entrée en grève de ces secteurs, mais en jouant la montre. Et, depuis deux mois, tout se passe comme si l’appareil voulait «montrer» au gouvernement qu’il pouvait bloquer ces secteurs… en se gardant bien de le faire.
Qu’on en juge: dans les ports? Ce sont des actions «ports morts» qui sont organisées, des actions d’une journée ou de 72 heures successives. Ainsi, du 15 au 17 janvier, puis du 22 au 24. Puis de nouveau le 29 janvier. En pratique, à Marseille par exemple, le port tourne au ralenti mais n’est pas paralysé.
Dans les raffineries? La mobilisation est réelle depuis le 5 décembre, mais la situation est très variable selon chacun des huit sites concernés et selon les moments. Au final, durant deux mois, il n’y eut quasi aucune pénurie.
En réalité, si les grévistes bloquèrent la sortie des carburants, ils ne mirent pas les raffineries à l’arrêt. L’exemple de Grandpuits [en Seine-et-Marne, à quelque 50 km de Paris,appartenant à Total] l’une des plus engagés dans le conflit, est illustratif: les grévistes ont bloqué, à partir du 5 décembre, toute sortie de produits mais n’ont pas mis en arrêt la raffinerie, une procédure lourde mais classique (pour entretien en particulier). A partir de fin décembre, les capacités de stockage étant saturées, les grévistes – plutôt que d’arrêter toute production – ont laissé sortir une petite quantité de produits. Finalement, la grève prit fin le 27 janvier.
A Lavera, par contre, près de Martigues [Bouches-du-Rhône], les grévistes de Petroineos ont engagé fin décembre le processus de mise à l’arrêt de la raffinerie, puis l’ont suspendu, avant de le reprendre à partir du 7 janvier. Le secrétaire de la CGT précise: «ce sont les salariés qui ont pris la décision d’aller plus loin, même pas le syndicat ».
Cela reste l’exception. Ainsi, dans deux autres raffineries proches, dont celle de Fos-sur-Mer (Esso), des blocages sont organisés, mais non l’arrêt des installations.
Le délégué CGT de la raffinerie de Fos reconnaît pourtant que l’arrêt de la production «est une bonne idée si on veut peser et créer la pénurie, mais », justifie-t-il, «les salariés n’en sont pas encore là». Les salariés ou la direction syndicale?
« Faire pression », « marquer les esprits », ou paralyser l’économie?
Dans le secteur de la production électrique, cette question se pose également. Des grèves touchent plusieurs sites, comme la centrale nucléaire de Chinon depuis le 10 décembre. Le 26 janvier, l’un des 4 réacteurs de la centrale du Bugey est mis à l’arrêt. Mais, globalement, elles ne mettent pas en danger le réseau.
En Isère, le 21 janvier, à l’appel de la CGT, les salariés de la centrale hydroélectrique de Grand’Maison ont voté l’arrêt de la production, et l’occupation de l’usine. Cette centrale étant la plus grande de France, son arrêt pourrait menacer le réseau, au moins au niveau régional, en cas de pic de consommation.
Or, ce n’est pas le but des initiateurs de la grève. Pour éviter une chute du réseau, les grévistes sont en contact direct avec le cabinet du ministère de l’Intérieur et avec le comité exécutif d’EDF qui les alerte en cas d’urgence. C’est ainsi que, dans la nuit du 21 au 22 janvier 2020, ils ont rétabli partiellement la production.
Le responsable local de la CGT est très clair: «On n’a pas cette volonté d’aller embêter quelque part l’usagé lambda en le privant d’électricité, mais c’est de faire pression, de dire:Nous avons un réseau dans nos mains. On est prêt à le tenir pour une durée indéterminée, mais derrière, on ne s’interdit pas d’agir sur cette production, et si on devait agir, aller plus loin entre guillemets, c’est bien le gouvernement par son obstination qui nous y pousserait » [1].
On n’est donc pas ici dans une logique de rupture avec le pouvoir, de marche à la grève générale, mais de pression limitée vis-à-vis de ce pouvoir.
Certes, le droit de grève est limité dans ce secteur, mais cette limitation est elle-même encadrée: la direction d’EDF peut imposer aux agents grévistes qu’ils garantissent la production nécessaire à l’équilibre du réseau, mais le Conseil d’État (décision du 12 avril 2013) précise que cette direction doit avoir utilisé au préalable tous les moyens nécessaires à cet équilibre, en particulier en recourant au dispositif d’«effacement» (EDF demande à certains gros clients de réduire leur production).
C’est avec la même logique de «pression» que sont lancées, dans la deuxième quinzaine de janvier, des actions «coups de poing», notamment des coupures de courant localisées, de quelques heures. Ainsi, le 21 janvier au sud de Paris, à Orléans, etc. Dans quel but? Le responsable CGT-Energie du Val-de-Marne explique qu’il s’agit de «marquer les esprits».
Une telle tactique de «pression» ne peut aboutir, au mieux, qu’à des aménagements marginaux du projet de loi, et non à son retrait pur et simple, ce qui impose d’affronter le pouvoir pour lui infliger une défaite.
Risques de débordement
Tout se passe comme s’il s’agissait de canaliser la colère des salarié·e·s.
Car nombre de travailleurs et travailleuses aspirent à s’affronter au pouvoir et peuvent échapper au contrôle des directions syndicales. Le mouvement des Gilets jaunes a fortement marqué les esprits, et certains d’entre eux sont présents dans les manifestations, souvent dans les «carrés de tête» des cortèges. Les directions syndicales doivent en tenir compte.
Encore faut-il, pour ces directions, ne pas aller trop loin et doser la pression sur le gouvernement. C’est ainsi que le Premier ministre exige que les coupures d’électricité sauvages soient «sanctionnées».
Mais la volonté de combattre de nombre de salarié·e·s continue de s’exercer sur les syndicats, avec des différences selon les secteurs et les entreprises. Un élu syndical CGT des égoutiers de Paris explique que «si on avait vraiment bloqué notre outil de travail», les conséquences auraient été catastrophiques, et il précise: « On ne veut pas en arriver là. Mais je peux vous dire qu’en tant qu’organisation syndicale, on est amené à freiner les agents, sinon ça irait beaucoup plus loin.» [2] Cela peut aboutir à des tensions fortes au sein des organisations syndicales. On l’a bien vu au sein de la très conciliante CFDT, dont la direction nationale se heurte à une CFDT-Rail très combative.
On l’a vu au sein de la non moins conciliante UNSA, dont la direction nationale défend les fondements du projet gouvernemental alors que l’UNSA-RATP est, à l’inverse, engagée fortement dans la grève contre ce projet de réforme.
Et on le voit aussi au sein de la CGT, où des secteurs minoritaires de l’appareil se montrent critiques face à l’orientation de la direction confédérale et de Philippe Martinez, la divergence essentielle portant sur le niveau de «pression» qu’il faudrait exercer sur le gouvernement, sans pour autant remettre en cause la politique de dialogue social mise en œuvre par la confédération.
C’est dans ce cadre que l’on peut apprécier une brève action conduite le 20 janvier. Pour la seconde fois est organisée une incursion dans les locaux de la CFDT. «Une quinzaine de personnes encagoulées » (selon la CFDT) auraient coupé l’électricité pendant «quelques minutes». Cette action toute symbolique est revendiquée par 9 syndicats CGT-Energie d’Ile-de-France qui déclarent: avec cette coupure, «c‘est la collaboration de classe qui a été plongée dans l’obscurité».
Cette action, que la direction confédérale de la CGT va mettre de longues heures à désavouer, s’inscrit aussi dans le cadre des tensions qui s’expriment au sein de l’appareil de la CGT. Et ce n’est pas seulement la CFDT qui était visée…
Philippe Martinez n’en maintient pas moins son orientation. La confédération CGT a accepté, deux ans durant, de participer à toutes les réunions de concertation ayant trait à cette réforme. Restait à faire connaître ce qu’elle allait faire après le courrier du Premier ministre officialisant (le samedi 11 janvier) la tenue d’une «conférence de financement» et précisant le mandat donné à cette conférence dont l’ouverture est prévue pour le 30 janvier.
Durant plus de deux semaines, la confédération se tait. Elle se contente d’indiquer que la conférence n’aura aucune marge de manœuvre, sans préciser pour autant si elle participera, ou non, à cette conférence. Même silence du côté de FO. Enfin, deux jours avant l’ouverture de la conférence, Philippe Martinez fait savoir que «oui», la CGT sera présente.
« On va aller à cette conférence pour dire ce qu’on a à dire »
Le gouvernement veut – sans attendre la mise en application de sa réforme – instaurer un «âge pivot» visant à repousser l’âge de la retraite afin d’économiser 3 milliards d’euros dès 2022 et 12 milliards d’économies par an en 2027 [3].
La «conférence de financement», proposée le 5 janvier par Laurent Berger pour la CFDT, et acceptée par le gouvernement, a pour objectif de trouver d’autres moyens pour arriver aux mêmes économies. C’est cela que les syndicats qui participeront à la conférence doivent régler. Or, le Premier ministre a fixé le cadre: il exclut en particulier toute hausse de la cotisation dite «patronale» pour trouver les milliards jugés nécessaires…
On doit ainsi considérer que cette conférence est le sommet de toute la politique de dialogue social conduite depuis deux ans avec le gouvernement Macron.
On comprend donc que cela ait fait débat au sein de la CGT et de FO et qu’il ait fallu attendre le 28 janvier pour que Philippe Martinez annonce [4] que la CGT participerait à cette conférence en précisant qu’il n’y serait pas personnellement.
Un journaliste fait mine de s’étonner: la CGT va donc participer à une conférence chargée de trouver «des moyens de financement d’une réforme dont vous demandez le retrait?» Réponse: «Tous les endroits où on peut dire comment améliorer notre système actuel, on y est».
Bien évidemment, ce sera en pure perte… sauf que, pour les salarié·e·s, cela induit l’idée que, malgré tout, il y aurait encore un dialogue possible avec ce gouvernement.
Et quelques heures plus tard, Yves Veyrier (secrétaire général de Force ouvrière depuis 2018) annonce qu’il participera en personne, au nom de FO, à cette conférence.
C’est dans ces conditions que s’est tenue, le 30 janvier, la première réunion de cette conférence, à l’issue de laquelle le Premier ministre a annoncé une nouvelle rencontre à Matignon dans «la semaine du 10 février», afin d’évoquer les sujets de «pénibilité », « départ progressif », «transitions» et les «petites pensions garanties» dans le cadre de la réforme des retraites.
Il ne s’agit donc plus de discuter seulement de l’âge pivot, mais de l’ensemble des points dont veut discuter la CFDT pour donner son plein soutien à la réforme: c’est une discussion qui est menée dans le cadre de ce projet de retraites à points.
C’est ainsi que ce dialogue social, combiné avec les grèves pression, contribue à entraver la mobilisation.
Une mobilisation mouvante et vivace
Le 29 janvier s’est tenue une nouvelle journée de grève et manifestations.
Par rapport au précédent «temps fort», le nombre de grévistes et manifestants était sensiblement moins élevé, mais encore important: à Paris, moitié moins de manifestant·e·s selon la CGT (180’0000) de même que dans les nombreux autres cortèges en province. Au total, il y a encore plusieurs centaines de milliers de manifestant·e·s.
Cela ne préjuge pas des développements ultérieurs. Car d’un côté, la grève se rétracte dans certains secteurs tandis qu’elle semble se développer dans d’autres. C’est le cas de secteurs frappés par de nouvelles attaques, contre lesquelles la lutte se combine avec la mobilisation contre le projet gouvernemental. C’est le cas à l’Université.
De même, en Guadeloupe et en Martinique, se développe une grève massive et prolongée depuis plus de dix jours dans l’enseignement.
Parallèlement se poursuivent d’autres luttes importantes contre la politique gouvernementale, notamment le combat des urgentistes et hospitaliers qui appellent à une nouvelle manifestation nationale le 14 février.
Une colère grandissante mais pour quel objectif?
Le gouvernement et certains médias se sont alarmés de l’hostilité grandissante à l’égard de Macron. Ils se sont émus de manifestants scandant: « Louis XVI, Louis XVI, on l’a décapité! Macron, Macron, on veut recommencer!».
Cela n’est pourtant pas très nouveau. Ce qui est peut-être nouveau, c’est la force et la fréquence avec laquelle Macron et ses ministres sont la cible des cortèges, des pancartes et chansons, des flash-mobs multiples telles celles des avocats.
45% des Français se disent « révoltés » par la situation sociale et économique (selon un sondage d’opinion publié le 24 janvier), et une majorité reste profondément hostile à la réforme des retraites.
Laurent Berger de la CFDT, lui-même, s’inquiète: « S’il n’y a pas d’avancée, on va rester sur cette situation extrêmement explosive », explique-t-il vendredi 24 janvier.
La colère sociale se mue en colère politique, et les diverses revendications se nouent en un rejet profond du pouvoir en place. « Etudiants, cheminots, même Macron, même combat » affirmait une pancarte de manifestant.
Mais une colère, en soi, ne donne pas une orientation qui permette d’isoler, d’affaiblir et de vaincre le gouvernement.
Et l’une des nécessités pour cet objectif, c’est que la mobilisation impose à toutes les directions syndicales qu’elles rompent le dialogue social et en particulier qu’elles sortent de la «conférence de financement». La rupture avec le gouvernement passe par la rupture avec tout dialogue social. Cela ne réglerait pas tout mais lèverait un premier obstacle. (31 janvier 2020)
Notes
- Sur BFM TV le 22 janvier 2020
- Le Monde du 26 janvier 2020
- Sur cette question de l’âge pivot, voir L’insurgé www.insurge.fr
- Sur France info le 28 janvier 2020
19 janvier 2020
France. Une effervescence sociale persistante, et une question non réglée
4 janvier 2020
France. «En défense des retraites: un combat sévère, et quelques enseignements»
15 décembre 2019